[Skieur Lab] Ep4 : Test Ski-Mojo, la solution pour skier sans douleurs au genou ?

16/04/2022 Par acomputer 719 Vues

[Skieur Lab] Ep4 : Test Ski-Mojo, la solution pour skier sans douleurs au genou ?

Nous avons effectué un test sur neige du Ski-Mojo, une genouillière en forme d'exosquelette conçue pour aider à la reprise du ski après une blessure ou réduire des douleurs au genou, augmenter votre puissance musculaire ou simplement préserver vos articulations.

Introduction

Enfant, j’étais fan de Steve Austin, l’homme bionique qui valait 3 milliards... Cependant, lorsqu’on m’a proposé de tester le Ski-Mojo, un exosquelette qui promet de réduire la fatigue musculaire et soulager les douleurs aux genoux, j’ai d’abord pensé qu’à quarante ans et des poussières, j’étais encore loin de l’âge légal pour avoir recours à de tels artifices pour prendre mon pied en skiant, d’autant que ma médaille de moniteur brille encore de mille feux...Et puis bon, la faute à un automne un peu oisif et à un début d’hiver catastrophiquement sec, constatant que le diamètre de mes cuisses s’était considérablement réduit, je me suis laissé convaincre. Rendez-vous était donc pris pour tester le « Mojo » mi-janvier à Serre-Chevalier pour ce qui s’annonçait comme ma première « vraie » journée de ski de la saison, avec une bonne couche de poudreuse, bien plus attirante que la neige artificielle des vacances de Noël. Le Ski-Mojo allait-il être l’arme ultime pour ne pas me faire distancer par mes potes locaux qui s’étaient déjà bien goinfrés et avaient accumulé du dénivelé pendant les six derniers jours ? Ça valait le coup de tenter l’aventure…

Fonctionnement

Le Ski-Mojo a été inventé il y a une douzaine d’années par Owen Eastwood, citoyen britannique qui a commencé le ski à la cinquantaine passée et a cherché un moyen de rendre l’activité plus accessible physiquement. L’appareil a ensuite été largement redesigné par Martin Hannaford avant son lancement commercial en 2007, couronné par un ISPO Award en 2008 (récompense décernée aux produits les plus innovants et prometteurs lors du salon professionnel des sports d’hiver de Munich).

Le principe du Ski-Mojo est d’utiliser un ressort pour soulager muscles et articulations en prenant en charge environ le tiers du poids de votre corps. On peut facilement imaginer le bénéfice pour des genoux usés (arthrose, décalcification, inflammation) d’un « régime express » qui vous ferait passer de 80 à moins de 60 kg et limiterait donc les efforts sur l’articulation... Mais le Ski-Mojo ne veut pas limiter son champ d’action aux skieurs « mous du genou » puisque pour les sujets sains, la promesse peut aussi se traduire de la façon suivante : 33 % de puissance musculaire supplémentaires sans passer par la case préparation physique ! C’est probablement encore un peu juste pour mettre Svindal à l’amende, mais pour les potes ça devrait suffire...L’exosquelette est composé d’une partie souple, en néoprène essentiellement, chargée de maintenir en place le quadriceps bionique, la tige amortisseur articulée et réglable en compression qui elle, se positionne sur l’extérieur de la jambe en se clipsant à l’arrière de votre chaussure de ski via un connecteur.

Réglage du Ski-MojoDétail du Ski-Mojo

Première impression

Le Ski-Mojo n’est pas un dispositif « Plug and Play ». Si l’appareil existe en deux tailles (ou plus exactement deux tarages de ressort, pour s’adapter à différentes plages de poids d’utilisateurs), il reste ensuite pas mal de réglages à effectuer pour l’adapter à votre morphologie (réglage de la longueur de la tige en fonction de la longueur du fémur et du tibia essentiellement) et surtout, parvenir à le positionner correctement sur votre jambe. Le bon positionnement du connecteur sur la chaussure est par exemple primordial : trop à l’intérieur et la puissance du ressort va faire partir vos pieds en canard, ce qui n’est pas l’idéal pour skier, à moins peut-être de vouloir concurrencer Rancho en skating sur La Transjurassienne… C’est pour cela que la marque a développé un réseau d’ambassadeurs, les « Mojo Masters », présents dans une vingtaine de stations françaises pour le moment, afin de pouvoir essayer l’affaire dans de bonnes conditions avant d’acheter. Il existe un connecteur spécifique pour tester l’appareil (qui vient pincer la partie arrière de votre chaussure sans l’abîmer) qui peut ensuite être remplacé par un connecteur fixe beaucoup plus discret, qui nécessitera juste de faire un petit trou dans vos souliers. Le réglage de la puissance du ressort se fait en fonction du poids mais aussi de la tonicité musculaire, du niveau technique de chacun et des éventuelles douleurs à soulager : il suffit alors de précontraindre le ressort du nombre de tours donné par le tableau d’équivalence. Facile.Une vingtaine de minutes ont été nécessaires à Jean Marc Glaude (monsieur Ski-Mojo en France) et Alexis Faure (le Mojo Master de Serre-Chevalier) pour effectuer et affiner les réglages avec une option souple de 10 kg sous mon poids étant donné mes genoux en bon état. Avant même de chausser les skis, en « test moquette », on ressent immédiatement l’assistance dans la phase de flexion (compression) et surtout d’extension (détente). Une petite gâchette permet de désactiver le système pour conduire, marcher, prendre le télésiège ou boire un café en terrasse sans passer pour un Zébulon.

Le test du Ski-Mojo

L’idéal, comme pour tout test de matériel, est de s’astreindre à un minimum de méthodologie afin de pouvoir ressentir au mieux (ou au pire) les effets. On commence donc par un peu de piste sans activer le système pour s’échauffer et en profiter pour repérer un parcours type. La piste rouge de la Draye, au relief varié et qui est rapidement desservie par le télésiège des Combes, s’avère parfaite pour l’exercice. Une fois prêt, j’active le système et m’efforce de repasser aux mêmes endroits et à la même vitesse. Et là, il n’y a pas photo, la puissance sur la carre est supérieure : on prend plus d’angle, on passe plus vite en courbe, bref, c’est beaucoup plus fun, un peu comme si on avait échangé une paire de skis un peu fatigués contre des « piste race » tout neufs. Il faut d’ailleurs faire attention à ne pas trop s’enflammer car ces nouvelles jambes montées sur ressorts peuvent perturber un peu dans la gestion des ruptures de pentes. Il faut penser à anticiper un peu plus sur les avalements sous peine de se faire satelliser. La quasi-absence de fatigue musculaire permet également de s’envoyer la piste d’une traite, même si votre capacité cardio vous rappelle à la raison, les poumons bioniques n’étant pas encore disponibles en option… C’est vraiment bluffant et on comprend mieux pourquoi c’est interdit en compétition (même si ce serait quand même bien tentant de s’inscrire à une Flèche ESF juste pour aller taquiner l’ouvreur qui aura enfilé sa jolie combinaison moulante pour l’occasion).Convaincu par la puissance du système, direction le télésiège du Prorel pour varier les plaisirs. En neige trafolée, qui plus est avec une visibilité assez moyenne, là encore, c’est tout bonus : l’absorption du terrain est optimale et on rattrape facilement les petites erreurs de placement. Bref, on se sent bien posé sur les skis. Et toujours ce mal de cuisse qui n’arrive que bien plus tard qu’habituellement ! Surprenant, mais assez logique : en évitant de se mettre dans la zone rouge grâce à l’assistance du Ski-Mojo, les muscles travaillent plus longtemps en mode aérobie avant de passer en anaérobie, et produisent ainsi moins d’acide lactique.Le télésiège de l’Aiguillette venant d’ouvrir pour la première fois de la saison, il était plus que temps d’aller goûter la poudre au milieu des mélèzes. Là, l’effet a été un peu moins convaincant. Est-ce le manque de pratique cet hiver ? En tout cas, l’équilibre avant / arrière, plus fin en neige fraîche que sur le damé, est un peu plus délicat à appréhender. Cela aurait certainement été moins gênant sur une face ouverte en enchaînant de grandes courbes à fond mais vu le BERA du jour, je me suis abstenu. Au fil des runs, la technique revient et tout s’est bien passé. Certes, le Mojo assiste moins que sur la piste mais ne gêne pas et les cuisses brûlent juste ce qu’il faut (ce qui pour un premier jour de poudreuse de la saison est plutôt remarquable).Toujours dans l’idée du protocole de test, j’ai décidé de ne pas désactiver le système, en tout cas pas trop tôt. D’après Jean Marc, il faut en effet laisser le temps à son corps (et à son cerveau) de s’habituer au Mojo, de se l’approprier en quelque sorte, pour l’exploiter au mieux. Ce n’est qu’après trois bonnes heures de ski « mojoïsé » que j’ai décidé de revenir sur mes jambes de mortel. Ça flotte un peu au début puis les sensations reviennent. Je remarque en particulier que je retrouve un peu plus de mobilité de cheville à l’intérieur de la chaussure, favorisant un toucher de neige et un placement avant / arrière plus fin. Toutefois, je me sens assez vite comme un junkie en manque, un cycliste sans EPO ou un sprinteur sans sa dose d’anabolisants... Il me manque de la puissance et qu’est-ce que j’ai mal aux cuisses ! La gâchette magique a été assez vite réenclenchée pour finir la journée, avant que mes potes ne se doutent de quelque chose.

Conclusion

[Skieur Lab] Ep4 : Test Ski-Mojo, la solution pour skier sans douleurs au genou ?

En résumé, le Ski-Mojo est une sorte de dopage mécanique qui présente bien des avantages pour un grand nombre de skieurs. On peut lui reprocher de gommer quelques sensations mais on s’habitue assez vite, et rien n’empêche de régler le ressort encore moins fort pour trouver le juste milieu entre puissance et feeling. N’ayant par chance pas de problèmes de genou, je ne peux rien affirmer mais il me paraît assez logique d’imaginer les avantages du système pour la majorité des cas. À chacun d’essayer pour se faire sa propre idée. En revanche, l’aspect préventif semble également intéressant, beaucoup de rupture du ligament croisé intervenant à cause d’une contraction trop violente des quadriceps lors d’un déséquilibre arrière. Le Ski-Mojo, qui était au début plutôt utilisé par des moniteurs, guides ou pisteurs, commence à élargir son public avec un bouche à oreille très positif venant de ceux qui ont pu continuer à skier ou se remettre au ski alors qu’ils étaient proches d’abandonner leur sport favori... On raconte même que certains en auraient pleuré de joie ! Mes potes locaux, eux, n’ont pas pleuré mais je les ai sentis un peu fébriles quand même à la fin de la journée.

Pour qui ?

A priori, tout le monde. Un petit niveau technique est tout de même nécessaire puisque le Ski-Mojo a été conçu pour skier en appui languette, donc en conduite coupée. Si vous skiez droit comme un piquet et que vous vous contentez de virer de bord à grands coups de rotations du buste, gardez votre argent pour prendre des cours de ski… Les moins de 35 ans, forts skieurs et en pleine forme sont également priés de s’abstenir, ce serait de la concurrence déloyale... Pour tous les autres, la balle est dans votre camp !

Les plus :

•La puissance•Permet d’amortir le forfait (moins de fatigue = plus de runs)•Mieux vaut prévenir que guérir (soulage donc préserve les articulations)•Pas gênant à porter et manipulation très facile (actionnement / débrayage)•Discret si porté sous le pantalon

Les moins :

•Petite perte de sensations qui peut gêner les bons techniciens•Descend un peu sur les jambes en position marche•Êtes-vous prêt à assumer ?

Combien ça coûte ?

560 euros, soit environ le prix d’une nouvelle paire de skis ou d’un abonnement annuel au club de gym. En tout cas, c’est bien moins cher qu’une nouvelle paire de genoux !

Plus de détails sur le Ski-Mojo ou pour réserver un essai : www.ski-mojo.fr

Compléments :

Le Ski-Mojo et la rupture du LCA

Contrairement à une orthèse orthopédique, le Ski-Mojo n’a pas été conçu pour éviter la rupture du LCA (Ligament Croisé Antérieur : LA blessure du skieur). Le Ski-Mojo peut d’ailleurs se porter en plus d’une genouillère pour ceux qui ont déjà une instabilité du genou. Les retours d’utilisateurs semblent quand même montrer que sur des hyperflexions (le cas classique du skieur qui se couche sur les talons de ses skis en réception de saut), le Ski-Mojo aide à limiter les dégâts, en sollicitant moins les ligaments. Toutefois, le Mojo s’avère être une aide précieuse pour la reprise du ski après une « ligamentoplastie », l’opération entraînant souvent une dégradation du cartilage et donc des douleurs qui peuvent être intenses.

L’avis de Mélanie Lenoir, ex skieuse en Coupe du Monde Géant et monitrice de ski aux Saisies

Mélanie utilise le Ski-Mojo depuis 2015, pour soulager des douleurs au dos (fréquentes chez les skieurs de haut niveau) et prévenir des douleurs au genou (inflammation du tendon rotulien) qui apparaissent surtout quand elle enseigne le ski : « Contrairement à beaucoup de skieuses, j’ai eu la chance de ne jamais me blesser au genou lors de ma carrière sportive. En revanche, quand tu enseignes pendant les vacances scolaires, les journées sont longues et avec les débutants tu es constamment en train de faire du chasse-neige et de freiner ce qui est vite traumatisant. Depuis que j’ai découvert le Ski-Mojo, je ne le quitte plus, d’autant que quand je skie pour moi, je constate que j’ai beaucoup moins de douleurs lombaires et je retrouve une partie de la puissance musculaire que tu perds forcément quand tu arrêtes la compétition. J’ai ressenti une petite perte de toucher de neige au début, mais aujourd’hui je me suis habituée, il n’y a plus de gêne. J’aimerais aussi expérimenter le Ski-Mojo avec de jeunes coureurs qui reviennent de blessure, afin de réduire la douleur pour pouvoir augmenter la charge de travail et donc favoriser une re-musculation rapide. »

L’avis de Hervé Gouy, freerideur et moniteur de ski aux Arcs

Hervé ne souffre d’aucune pathologie, si ce n’est d’avoir, comme tout skieur, mal aux jambes à la fin des grosses journées de ski. Il utilise le Ski-Mojo, en l’activant ou pas selon les conditions et les envies du jour : « J’ai découvert le Ski-Mojo en mars 2015 et j’ai beaucoup skié avec sur la fin de saison. Je l’apprécie particulièrement sur piste, pour skier vite quand la neige est dure comme en ce début de saison, grâce à la puissance fournie, mais j’y trouve aussi une dimension pédagogique, car il aide à trouver un bon rythme et à bien skier en appui deux pieds. Le fait de moins ressentir de fatigue musculaire t’aide à te concentrer sur ta technique. Le matin je ne me pose plus de question, j’enfile mon Ski-Mojo (en 3 minutes chrono) et après je l’actionne ou pas en fonction des conditions rencontrées et de la forme du jour. J’ai réglé le ressort au minimum car j’aime bien continuer à faire travailler mes cuisses. »