Avion, mode, viande, vidéo en ligne ou voiture, à quoi les Français, les Européens, les Américains et les Chinois sont-ils prêts à renoncer pour lutter contre le changement climatique ? - GoodPlanet mag'
Pour 40 % des Européens, 38 % des Américains et 43 % des Chinois, cesser de prendre l’avion serait le geste le plus facile à accomplir afin d’agir contre le réchauffement climatique, selon un récent sondage de la Banque Européenne d’investissement (BEI). Son enquête d’opinion propose aux sondés de choisir parmi 5 aspects de la vie courante à quoi ils seraient le plus facilement prêts à renoncer entre la viande, l’avion, les vidéos en ligne, l’achat de vêtements et la voiture individuelle. Et aussi, à l’inverse, quelle action serait la plus difficile à leurs yeux.
À quoi les Français sont-ils prêts à renoncer ?
Selon ce sondage, 8 Français sur 10 affirment faire des efforts en faveur du climat. Ils sont cependant 6 sur 10 à penser que leur comportement peut faire la différence.
Pour 41 % des Français, ne plus posséder de voiture serait le geste le plus difficile à accomplir en faveur du climat. Renoncer à la viande arrive en seconde position avec 23 % des sondés, suivi par renoncer au streaming vidéo et à l’achat de nouveaux vêtements, tous deux cités par 13 % des répondants. Et, enfin, ne plus prendre l’avion arrive dernier au classement des gestes les plus difficiles à effectuer en faveur du climat. Il est intéressant de noter que se séparer de sa voiture est jugé comme le geste le plus contraignant par 56 % des plus de 65 ans contre seulement 26 % des 15-29 ans, ce qui témoigne d’un rapport différent à l’automobile chez les jeunes générations.
Les Français classent par ordre de facilité les actions suivantes : renoncer à l’avion (40 %), ne plus manger de viande (18 %), ne plus visionner de vidéos en ligne (18 %), ne pas acheter de vêtements neufs (14 %) et enfin ne plus avoir de voiture individuelle (10 %).
En Europe, renoncer à l’avion oui, mais pas à la voiture
7 Européens sur 10 pensent que leur comportement peut contribuer à lutter contre le réchauffement. Dans l’Union européenne, renoncer à l’avion arrive en tête (40 %) des gestes les plus prisés pour réduire les émissions de gaz à effet de serre devant renoncer au streaming vidéo (18 %), arrêter de manger de la viande (16 %), ne pas acheter de nouveaux vêtements (15 %) et enfin ne pas posséder de voiture individuelle (11 %). À l’inverse, 41 % des Européens déclarent qu’abandonner la voiture serait le sacrifice le plus difficile qu’on leur demanderait et pour 26 % d’entre eux ce serait de se passer de produits carnés.Dur de renoncer à la voiture aux USA, dur de renoncer à la viande en Chine
Pour 38 % des Américains se séparer de leur voiture individuelle serait un crève-cœur (la réponse arrive en tête) tandis que pour 35 % des Chinois, ne plus manger de viande relève de l’impossible.
Toutefois, renoncer à l’avion fait consensus, le secteur aérien est responsable de 2,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, puisque 38 % des Américains et 43 % des Chinois affirment pouvoir renoncer à ce mode de transport pour voyager. Vient ensuite le renoncement aux vidéos en ligne, qui convainc 22 % des Américains, mais seulement 13 % des Chinois sachant qu’actuellement son impact climatique est encore mal connu mais évalué à plus de 300 millions de tonnes de CO2 équivalent par an, soit au moins 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Surtout, le secteur du numérique connait une croissance sans précédent. Seuls 14 % des Américains et 15 % des Chinois disent que passer à un régime végétarien serait pour eux une action aisée en faveur du climat, or la viande et la déforestation provoquée par l’élevage sont responsables d’au moins 14,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Enfin, ne pas posséder de voiture individuelle est envisageable pour seulement 8 % des Américains et 15 % des Chinois. Le secteur des transports représente plus du quart (28 %) des émissions mondiales de gaz à effet de serre, avec une part conséquente imputable à l’automobile.
« Autour du monde, les personnes sont conscientes que leur comportement peut faire la différence », affirme le vice-président de la BEI Ambroise Fayolle. « Notre rôle est d’accélérer la transition verte en finançant des énergies propres, des solutions de mobilité durable et des innovations qui permettent à chacun de changer ses habitudes pour faire face au changement climatique. »
Le renoncement, une question complexe
Il n’est pas dans les habitudes de GoodPlanet Mag’ de commenter des sondages : ces derniers sont des instantanés de l’opinion à un moment donné dont la méthodologie souffre de nombreuses limites. Les enquêtes d’opinion reposent notamment sur des déclarations et non sur des faits. De plus, la formulation des questions peut orienter les réponses restreintes offertes aux répondants.
Cependant, le sondage de la BEI a retenu notre attention car il aborde frontalement la question des changements de mode de vie induits par la transition écologique sous le prisme du renoncement, thème que nous abordons régulièrement via des articles ou dans certains entretiens. En effet, afin de réduire l’empreinte carbone des habitants des pays les plus émetteurs, les plus riches du monde, repenser les modes de consommation et de vie sera une nécessité. Décarboner l’économie implique de profonds changements dans des habitudes acquises depuis des décennies avec la généralisation de l’usage des énergies bon marché. Pétrole, gaz, charbon et électricité se trouvent omniprésents au quotidien, contribuant à un confort sans précédent dans l’histoire humaine. Or, le piège du confort est qu’il apparait comme un luxe superflu tant qu’on n’en bénéficie pas, puis devient rapidement indispensable une fois qu’on s’y est accoutumé.
La lutte contre le réchauffement se fera par des actons individuelles ; elle aboutira aussi grâce à des choix collectifs et des politiques écologiques. Les deux démarches se complètent et s’alimentent : les changements individuels orientent les marchés et les politiques publiques, tandis que des cadres communs soutiennent les petits gestes, leur donnent une portée et incitent à leur généralisation. Par exemple, se déplacer à vélo plutôt qu’en voiture a du sens, mais sera facilité si l’organisation des villes facilite les déplacements à vélo, ce qui– cela peut prendre du temps – lance une dynamique vertueuse. Mais, le choix du vélo sera peut-être plus évident pour un urbain vivant dans une ville dense que pour des personnes vivant en périphérie ou à la campagne pour lesquelles de plus longs trajets sont requis pour se rendre au travail, faire ses courses ou visiter des proches. Les questions de choix individuels et collectifs se comprennent donc dans des contextes et des contraintes spécifiques, propres à chacun. Ces sujets méritent des débats, c’est d’ailleurs cet aspect-là qui a conduit le gouvernement à mettre en place la Convention Citoyenne pour le Climat afin de demander à 150 citoyens tirés au sort de parvenir à un consensus sur les mesures à adopter pour réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.
Répartir les efforts tout en suscitant de l’acceptabilité sociale afin que l’écologie ne soit pas vue comme punitive, constitue une des difficultés à la mise en place de mesures environnementales alors qu’il existe pourtant un large accord sur les crises écologiques. L’écologie devient punitive dès le moment où des décisions semblent impliquer une restriction de liberté et sans offrir de contreparties bénéfiques ou d’alternatives. Ce type de sondage, malgré seulement 5 axes de renoncement proposés, permet donc d’entrevoir les réticences ou, au contraire, les domaines sur lesquels travailler le changement pour l’accompagner.
Il est intéressant de noter que voler moins fait consensus, cependant prendre l’avion reste le fait d’une minorité de la population tandis que remettre en cause la voiture individuelle est plus compliquée, puisque celle-ci est un élément central de la vie de nombreuses personnes dont les Français.
Et vous, à quoi seriez-vous prêts à renoncer pour lutter contre le changement climatique ? Faites nous en part dans les commentaires.
Julien Leprovost
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