Hivernale Moto : vers les Marmottes de Saint-Véran en Honda Monkey 125

15/04/2022 Par acomputer 749 Vues

Hivernale Moto : vers les Marmottes de Saint-Véran en Honda Monkey 125

Jeune citadin détenteur du permis A2, pratiquer la moto n’est, pour moi, que synonyme de pérégrinations en Ile-de-France, rien de plus. Mais à coté de ça, je rêve de partir en voyage à moto, parcourir l’Europe, l’Asie... voire le monde armé d’une tente et d’un duvet. Pour tout avouer, mon rêve le plus fou serait d’arpenter les routes japonaises aux cotés des Bosozoku sans limite de temps... Ma récente rencontre avec Gilles Mariani, ex-globe trotter en Peugeot 102 et 103, m’a plus que jamais réveillé l’appel du voyage.

Finalement, ma première aventure sera française. Quoi de mieux que d’explorer nos contrées lors d’un premier roadtrip moto ?

Les prémices de l’aventure

Lors d’un déjeuner avec la rédaction, Philippe évoque l’idée d’un reportage à l’hivernale des Marmottes de Saint-Véran, les 7, 8 et 9 janvier 2022. Il me propose de l’accompagner avec Thierry (gérant de Moto Magazine) et Fred (journaliste monteur vidéo) : "Ça te botterait de nous accompagner dans les Hautes-Alpes ?" me demande-t-il. Je réponds par l’affirmative, toujours friand de nouvelles expériences à moto. Ma réponse enjouée déclenche une hilarité collective. "En es-tu bien sûr ? C’est pas évident comme parcours, tu vas te les cailler !" s’exclame-t-il, tout sourire. Je maintiens ma position et relève le défi : "T’inquiètes pas, être frileux, c’est pas mon genre..."

Quelle moto aurais-je la chance de piloter lors du périple ? Philippe me ramène sur Terre en me proposant un Honda Monkey 125. Face à mon regard crispé, il m’explique qu’il n’y a pas mieux qu’un petit 125 cm3 avec les pieds à plat en cas de glisse. Ça se tient ! Moi qui m’imaginait déjà au guidon d’une Royal Enfield Himalayan... Mais allons bon ! Je reste attentif aux sages conseils des motards aguerris.

Hivernale moto : mais qu’est ce que c’est au juste ?

En plus d’être Community Manager, rédacteur web et présentateur de motos éligibles A2 chez Moto Magazine, j’administre les rubriques du site, tel que l’agenda événementiel. C’est là que j’ai découvert l’existence des hivernales moto : Millevaches, Marmottes... Curieusement baptisés, ces événements semblent majeurs au regard des divers compte-rendus corrigés et publiés.

Le concept est simple : des baroudeurs moto partent se retrouver et camper dans les montagnes. Rien qui ne m’envoie du rêve à première vue, mais la curiosité l’emporte ! Qu’est-ce qui peut motiver tous ces motards à partir si loin (et si haut !) en plein hiver ?

Premier voyage à moto : de Grenoble / Villard-Bonnot à Saint-Véran en Honda Monkey 125

Toute la rédaction est claire : il faut que je m’équipe convenablement sous peine de finir comme Jack Nicholson à la fin du film Shining. Je dresse les seules armures que j’ai sous la main : bottes touring, sous-vêtements thermiques, pull en laine, gants hiver, blouson mi-saison et combinaison de pluie. Lorsque j’observe l’équipement pointu déployé par mes collègues, je fais pâle figure en me disant que ma non-frilosité jouera un rôle majeur dans l’épreuve...

À bord du Honda Monkey 125, je suis immédiatement à l’aise. Comme me l’expliquait Philippe lors de mon essai de la CB500F, même en fermant les yeux, on sait que l’on a une Honda entre les mains : les commandes souples, la boite de vitesse douce et précise, les commodos naturellement sous les doigts.... Je me sens "chez moi" au guidon de cette petite moto.

En partance pour Saint-Véran, je suis surpris par la maniabilité, le confort, la légèreté (104 kg tpf !) et la vigueur des 9,4 ch de la machine. Le rapport poids/puissance, les pneus crampons et la faible hauteur de selle créent une alchimie rassurante sur les routes des Hautes-Alpes.

Première montée dans les montagnes, la neige et le froid glacial percutent ma combinaison de pluie. La brume se lève sur la route bordée de neige et de verglas. Le Monkey résiste, ne vacille pas et s’adapte aux conditions. Je veille à rouler sur les traces de pneus des usagers pour maintenir l’adhérence. Ma vitesse moyenne est de 50 km/h, je ne peux faire plus dans ces circonstances. Je remarque que Philippe et son side-car Mash Side Force ne fait guère mieux (t’as vu ça où, coco ? Note de PG). Seul Thierry et sa Zontes 310T chaussée de pneus toutes saisons (Dunlop Mutant) semble être le plus à l’aise. Le veinard !

Hivernale Moto : vers les Marmottes de Saint-Véran en Honda Monkey 125

Une heure de route plus tard, nous passons par la partie nord de la route Napoléon (Vizille par la côte de Laffrey, La Mure et Corp). La brume se lève et le soleil illumine les montagnes, les ruisseaux et le manteau blanc illustrent les décors. Les paysages sont si sublimes que j’en oublierais presque mes lèvres gercées et l’extrémité de mes doigts gelés par le vent de congélateur. Finalement, les 70 km/h de vitesse moyenne sont une aubaine pour ne pas finir en yéti...

En descente vers Gap, les routes de montagne se recourbent et se raidissent, façon spéciale de rallye ou piste de drift. Agrippé au guidon du Monkey 125, j’ai la tentation d’empoigner les freins, fort efficaces sur cette machine. Mais ce serait synonyme de se mettre au tas. Instinctivement, je change de stratégie à l’approche des épingles : calé sur les traces de pneus dessinées aux extrémités de ma voie, je délaisse le frein avant, pose mon pied sur le frein arrière, prêt à dégainer mon pied gauche au sol. Je tombe un rapport en amont et joue sur le frein moteur.

Une fois dans l’épingle - toujours placé sur les pistes tracées par les usagers pour esquiver le gel - je penche légèrement mon buste, porte mon regard en sortie de virage, dose mon accélération en douceur et me redresse sur la route... Je m’exclame de soulagement, car ça fonctionne ! Je ne remercierai jamais assez ma prudence naturelle conjuguée aux qualités intrinsèques du Honda Monkey 125.

Technique toute trouvée, la boule au ventre s’estompe et je profite à nouveau des décors flamboyants des Hautes-Alpes. Nous traversons Gap, direction plein Est. Une pause nous est accordée à Savines-le-Lac, face au lac de Serre-Ponçon. Que dire, à part multiplier les superlatifs d’émerveillement face au spectacle...

De retour sur la route, nous montons vers Saint-Véran, où le tracé se révèle plus facile à appréhender qu’en descente. L’expérience et l’apprentissage acquis sur ma petite moto facilitent mes virages en dépit des revêtements glissants.

Les paysages sont de toute beauté, si bien qu’y revenir pour découvrir le patrimoine de la région s’inscrit dans mes futurs programmes. De village en village (Embrun, Guillestre), nous arrivons sur Château-Queyras. L’édifice surplombant la vallée, à mi-chemin entre un château fort et une résidence secondaire "moderne", cultive mon imaginaire ; je m’amuse à supposer que le petit cousin de Dracula y a trouvé demeure...

Derniers virolos et nous arrivons enfin sur Saint-Véran, plus haute commune d’Europe. Un superbe petit village aux maisons de bois construit tout en hauteur.

En amont, un "village dans le village" s’y dresse : la fameuse concentre des Marmottes. Victoire !

L’hivernale des Marmottes de Saint-Véran : une ambiance unique, un accueil chaleureux

L’accueil par les "marmotards" est si chaleureux qu’il réchauffe presque mon corps engourdi. L’ambiance m’évoque celles des festivals de musique aux aspects de village Mad Max, faits de tentes, de barbecues et de curiosités mécaniques.

En effet, la majorité des machines présentes sont des side-cars bien préparés et des gros trails "tunés" pour affronter la neige et la glace.

La plupart des motards esquissent un grand sourire en me voyant débarquer sur ma petite moto. "C’est une ancienne ?" me demande l’un. "Ah mais c’est un Dax?" me demande l’autre. La plupart sont abasourdis de voir qu’une telle machine existe au catalogue en 2021, et surtout, que l’on puisse grimper si haut en montagne à son guidon !

Pour autant, le couple de side-cariste avec qui je sympathise n’est pas étonné. "Oh tu sais, je suis déjà monté aux Marmottes en Motobécane. L’avantage c’est que tu peux mettre les pieds si jamais ça glisse !". Le spectre de Philippe se dessine dans la brume hivernale et me chuchote un petit "J’te l’avais dit !".

Se balader dans une telle concentre, c’est un peu comme visiter un paddock de Star Wars. Les machines débordent de variété et d’inventivité mécanique. Les trails (Africa Twin, Transalp, Ténéré 700, 790 Adventure, R 1200 GS...) arborent des mini-skis suspendus ou dépliables aux pieds afin de maintenir l’équilibre sur la neige (première fois que je vois de telles installations !).

Les side-cars quant à eux, semblent parés pour faire le tour du monde. D’autres motos plus "classiques" s’installent de temps à autre, en témoignent les quelques Royal Enfield Bullet et Triumph Bonneville.

Je reconnais la fameuse BMW K1 et sa magnifique robe rétro-futuriste 80’s, attelée à un "panier" assorti. Une Yamaha VMax déboule, elle aussi attelée.

Puis je m’approche de cette superbe VFR 750 RC36 rougeoyante, où son jeune pilote m’explique qu’il a simplement chaussé les pneus avec des housses neige de voiture réadaptées. Comme quoi, avec un minimum de préparation, on peut envisager une Hivernale avec diverses motos...

La jeune Marie - permis A depuis peu - et sa CB500 PC32 est le plus bel exemple : malgré quelques glissades, elle a vaincu les routes tortueuses des Hautes-Alpes pour rejoindre sa troupe d’amis ici, à Saint-Véran. Quelle vaillante héroïne !

Plus tard je croise l’ami Marco, dessinateur de Moto Magazine et habitué des hivernales. On discute moto, de son ancienne Kawasaki W650, de sa Royal Enfield Bullet qui l’a transporté sur des milliers de kilomètres. Mais cette fois-ci, il est venu avec son ami Bertrand, en passager de "l’Orange Bleue", un side-car Triumph 900 Scrambler conçu par Alternative side-car.

Je lui fais remarquer les belles Yamaha FJ1200 ça et là, soigneusement préparées en Side. Il m’explique que le panier "Comete", imaginé par l’entreprise "Side Bike", était spécialement conçu pour cette moto dans les années 80.

Mais ce qui m’interpelle le plus, ce sont les nombreux Side biodesign tout droit sortis d’un salon de concept-bike ou mieux, d’un film de science-fiction : les Side-Bike Zeus. Marco me détaille que ceux-ci sont des préparations 100% Side, motorisées par des 4 cylindres de Peugeot 206 (!). Elles se pilotent avec des pédales et arborent un tableau de bord de voiture. Je reste pantois devant ces "Frankenstein" du 3-roues...

Le soleil se couche, les -10 degrés picotent, je m’approche du barbecue de fortune d’une troupe de jeunes passionnés des hivernales. L’un d’eux, agréablement surpris que je sois le détenteur du Honda Monkey 125, m’explique qu’il vient justement d’en acheter un d’occasion pour alterner avec sa 790 adventure. Le courant passe, la bande est de ma génération d’âge. On parle moto, manga et même Bosozoku ! Un jeune motard me raconte qu’il a découvert cet univers grâce à notre apéro sur le sujet. Voilà qui fait grand plaisir !

La fatigue commence à peser sur l’équipe, il est temps de rentrer manger et laisser reposer ces beaux souvenirs... Avant de reprendre la route le lendemain vers de nouveaux périples.

Le Honda Monkey 125, ce fidèle allié par tous les temps

Que ce soit lors du périple jusqu’à Saint-Véran, ou lors de la redescente vers Grenoble, le Honda Monkey 125 s’est avérée être une merveilleuse petite machine. En dépit des conditions climatiques et routières, il s’est toujours voulu rassurant sans faire défaut. Les quelques glisses ont vite été corrigées par ses crampons, son frein arrière et son couple dosable.

Sa facilité de pilotage et sa vigueur m’ont accompagné pendant 2 jours complet sans faiblir. À l’instar de la Honda CB500F, j’éprouve un coup de cœur pour cette vaillante petite moto, facile à emmener partout, même au cœur des Hautes-Alpes.

De retour sur le bitume d’Ile-de-France, je redoute le moment où je vais devoir m’en séparer. Car aussi surprenant que cela puisse paraitre, il est tout aussi attachant dans la jungle urbaine qu’en montagne.

En vérité, le Honda Monkey est bien plus qu’un 125 : c’est un symbole de liberté accessible à toutes et tous, habilité à emmener partout, par tous les temps et ce, à moindre coût (consommation d’1,5L aux 100 !).

Quant à l’aventure de 200 km vers Saint-Véran et la culture qui s’est ouverte à moi, elles me resteront en mémoire. Le microcosme de motardes et motards, motivés par le dépassement de soi et animés par la joyeuseté de partager ses aventures est quelque chose de rare, voire inexistant où je réside.

Rien que pour cela, j’invite tous les jeunes motard(e)s, A2 ou non, à tenter l’expérience. Avec un minimum de préparation (équipements, housses de pneus hiver), une moto adéquate, tout en prenant garde d’esquiver les dangers potentiels (rouler sur les traces de pneus, éviter le verglas et limiter l’utilisation du frein avant sur les routes gelées), l’aventure en vaut la chandelle !

_Crédit photos : Emerick Houplain, Nicolas Baudon, Eric Bleuse

Nicolas Baudon - 25/01/2022