Comment être snob en 2015 ? | Vanity Fair LargeChevron Menu Close Facebook Twitter Instagram Pinterest Facebook Twitter Email Facebook Twitter Email Facebook Twitter Instagram Pinterest LargeChevron
Déjà, ne pas gloser sur les origines, l’étymologie du mot “snob”, rabâchées, ressassées par tous ceux qui se prennent pour Monique Pinçon-Charlot, la Rosa Luxemburg des riches et des nobles appointée par le CNRS. Non, chercher d’où ça vient, ce n’est plus dans le coup, coco. En réalité, pour être franc, le mot “snob” est démodé, déclassé, presque tocard. Être snob, se dire snob et se laisser dire snob, ça vous a comme un parfum de chanson de Boris Vian. Oui, J’suis snoooob, statut volontariste envisagé comme un microbe ravageur.
Être snob en 2015 ? Un vrai suppositoire. A priori ça coince mais ça devrait passer. Question de doigté. Et de distance : les vrais snobs en auront toujours une ou deux d’avance. Encore plus snob que tout à l’heure ou commander son suaire chez Rick Owens. Ça c’était hier quand on pensait le snob moribond. Que nenni ! Le snob est bien vivant, tapi dans l’ombre des arcades du Palais Royal et prêt à reprendre du service. Il suffit juste de le convaincre d’épouser et honnir quelques causes et attitudes dont on aimerait bien se débarrasser sans se salir les mains. Ainsi, en vrac, au pif et sans hiérarchie, du café gourmand –on n’en peut plus, des hipsters barbus –on n’en veut plus, des pantalons mal coupés couleur diarrhée portés par les pseudo no-gluten –une vraie plaie, ou encore des filles chaussées en Jonak, véritable fléau endémique.
Être snob en 2015 ? Jamais question posée n’a été aussi idiote. C’est pourtant évident : pour être snob, il suffit juste de faire le strict contraire de ce que font les autres. Travailler, par exemple. Ou lire un vrai livre au lit le soir avant de dormir. Ou partir près quand tout le monde part loin. Voyez, c’est pas bien compliqué. Enfin si, car il faut une sacrée force de caractère pour vivre à rebours et tourner les pages d’un livre imprimé avec des phrases dedans.
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Être snob en 2015, c’est continuer à rire de tout en dépit du ciel qui va nous tomber sur la tête. C’est acheter du café Hawaï Kona Extra Fancy à 29 euros les 100gr mouture moka chez Verlet, juste en face du siège du Canard Enchaîné alors que ses journalistes ont été menacés d’être hachés menu.
Être snob en 2015 c’est justement snober la sinistrose en savourant chaque instant : l’urgence, l’angoisse, la peur sont d’insoupçonnables catalyseurs.
Être snob en 2015, c’est savoir que l’année durera une seconde de plus –le 30 juin, et mettre sa Rolex au contrôle technique deux semaines avant, comme ça, pfff, nada, et ça donnera du temps de taf en plus aux horlogers suisses.
Être snob en 2015, c’est se remettre à écrire au stylo –bille, feutre, mine, plume, en s’appliquant un chouia, histoire de narguer ces abrutis baliseurs qui veulent imposer l’écriture bâton aux écoles, sous prétexte qu’avec l’ordinateur, les pleins et les déliés, c’est trop Sergent Major....