Tom Ford, Stella McCartney, Phoebe Philo… ces designers qui ont fait des étincelles avant de lancer leur marque éponyme
88Tom Ford et Stella McCartney lors d'une soirée Gucci en 1999 © Pool ARNAL/CHARRIAU/Gamma-Rapho via Getty Images ParMarine Poyer
Dans le microcosme de la mode, choisir le bon directeur artistique peut faire ou défaire le destin d’une maison de couture. Et si certains designers n’ont aucune intention de voir leur nom s’étaler en lettres capitales au-dessus de la porte, d’autres ont œuvré dans l’ombre durant plusieurs saisons avant de lancer leur propre marque. Retour sur ces faiseurs de miracles aux doigts d’or.
Tom Ford, le sauveur de Gucci
© Splash News/ABACAPRESS.COMLorsque Tom Ford fait ses débuts chez Gucci en 1990, la maison italienne n’a pas la place prépondérante qu’elle occupe aujourd’hui sur la scène mode. Vieillissante, elle est régie par Dawn Mello et peine à se renouveler. Lorsqu’elle cette dernière engage Tom Ford, elle lui confie la ligne de prêt-à-porter féminin. En quatre ans à peine, il gravit tous les échelons pour finir par être nommé directeur artistique de la griffe en 1994. Sous son égide, cette dernière prend un virage ultra-sexy et devient notamment la vitrine de l’esthétique porno chic, mise au point par le créateur, Carine Roitfeld et Mario Testino.
Lorsqu’il quitte la griffe florentine en 2004, elle compte parmi les maisons les plus cotées du moment. Abandonnant en même temps les fonctions similaires qu’il occupe chez Saint Laurent depuis 2000, il est un temps pressenti pour venir au secours de la maison Versace avant de se faire finalement oublier quelques saisons. En 2005, il signe son grand retour, en lançant sa marque éponyme en proposant tout d’abord une ligne de parfums et une gamme d'accessoires et de lunettes de soleil. Le prêt-à-porter viendra quelques saisons plus tard.
Alber Elbaz, l’homme providentiel de Lanvin
© Christophe Guibbaud/ABACAPRESS.COMAprès des passages remarqués chez Guy Laroche et Yves Saint Laurent Rive Gauche (où il sera d’ailleurs remplacé par Tom Ford) Alber Elbaz rejoint les rangs de la maison Lanvin en 2001. Pendant près de quatorze ans, il rend ses lettres de noblesse à la plus ancienne maison de couture française. Son style, féminin mais jamais niais, est porté aux nues et il est invité, en 2010, à confectionner une collection capsule pour le géant H&M. Récompensé d’un CFDA Award et considéré par le magazine « Time » comme l’une des 100 personnes les plus influentes de 2007, il est toutefois congédié en pleine gloire par la propriétaire de la griffe en 2015. Quatre ans plus tard, il lance sa propre marque, baptisée AZ Factory, dont la première collection est présentée en janvier 2021, quelques mois seulement avant sa disparition, le 24 avril dernier.
Stella McCartney, la pépite Chloé
© Splash News/ABACAPRESS.COMLorsqu’elle fait ses débuts de designer chez Chloé en 1997, Stella McCartney y succède à Karl Lagerfeld, célèbre pour avoir ressuscité la maison deux fois, la première en 1966 et la seconde, en 1992. L’enjeu est de taille et la pression est au rendez-vous. Mais âgée de seulement 25 ans, la créatrice britannique relève le défi avec brio et offre une nouvelle jeunesse aux collections de la griffe parisienne. En 2001, elle quitte ses fonctions afin de lancer sa griffe éponyme, spécialisée dans la confection d’une mode plus green, laissant le destin de Chloé entre les mains de son amie, Phoebe Philo.
Donna Karan, l’héritière d’Anne Klein
© Gerardo Somoza/Startraks/ABACAPRESS.COMDans le monde de la mode, peu de relations sont aussi fusionnelles que celle qui a uni Anne Klein à Donna Karan pendant plusieurs décennies. La première, pionnière du prêt-à-porter américain dès la fin des années 40 prend la seconde sous son aile dans les années 60, lorsqu’elle décroche un petit job d’été dans sa société. Passionnée, Donna Karan gravit peu à peu les échelons, jusqu’à devenir le bras droit de la créatrice en quelques années seulement. Lorsque cette dernière décède en 1974, c’est tout naturellement que Donna Karan reprend les rênes de la griffe. Elle la dirigera pendant dix ans, jusqu’à son départ en 1984. L’année suivante, elle fonde sa griffe éponyme et présente en mars sa collection de Seven Easy Pieces, une gamme de sept essentiels faciles à assembler pour créer une garde-robe chic et versatile.
Yves Saint Laurent, le dauphin de Christian Dior
© UPPA/Photoshot/ABACAPRESS.COMA l’époque où Christian Dior décède le 24 octobre 1957 alors qu’il prend les eaux à Montecatini (Italie), la tradition veut encore qu’une maison de couture s’éteigne en même temps que son fondateur. Cependant, le couturier avait tout prévu : dans sa correspondance, il avait d’ores et indiqué que l’un de ses assistants, entré à son service seulement deux ans auparavant, pourrait occuper une place plus importante dans le processus de création. Son nom ? Yves Matthieu-Saint-Laurent. Son style ? Déjà bien affirmé, puisqu’il est notamment le père de la robe noire et blanche portée par le mannequin Dovima sur l’iconique photo « Dovima et les éléphants » de Richard Avedon. En novembre 1957, le jeune homme âgé de seulement 21 ans prend la direction artistique de la griffe. Loué de tous, il présente en janvier 1958 sa première collection pour la maison de l’avenue Montaigne, sous les applaudissements de la presse et des clientes. Cependant, en 1960 il est appelé à effectuer son service militaire. La griffe parisienne le remplace par Marc Bohan tandis qu’il prépare de son côté le terrain pour lancer sa propre maison de couture. Cette dernière voit le jour en 1962.
Karl Lagerfeld, l’homme-orchestre
© Thierry Orban/ABACAPRESS.COMPeu de designers peuvent se vanter d’avoir eu sur la mode de leur époque une influence aussi importante que celle exercée par Karl Lagerfeld pendant près de soixante-dix ans. Après avoir occupé le poste d’assistant chez Balmain de 1955 à 1959, année où il est nommé directeur artistique de la maison Patou suite à la disparition de son fondateur, il propose en 1963 ses dessins à Gaby Aghion, mère de la maison Chloé. Trois ans plus tard, en 1966, elle lui laisse carte blanche et les ventes de la griffe décollent. Mais ce n’est pas assez pour le Kaiser, qui prend un plaisir fou à dessiner pour de multiples griffes à la fois. En parallèle, il rejoint dès 1965 les sœurs Fendi à Rome afin de les aider à rajeunir la maison familiale. Quelques années plus tard, en 1982, les propriétaires de Chanel font appel à lui pour raviver la griffe, alors à deux doigts de la faillite. Une fois de plus, c’est une idée qui s’avère lumineuse. Fort de ces multiples contrats (qu’il conservera, pour Fendi et Chanel, jusqu’à son décès en 2019), il lance en 1984 sa marque éponyme, réputée pour réinterpréter sans relâche ses codes vestimentaires les plus emblématiques.
Serge Ruffieux, le raviveur de Dior
© Aurore Marechal/ABACAPRESS.COMRemplacer un designer star à la direction artistique d’une grande maison de couture peu parfois prendre un peu de temps. Ainsi, lorsque Raf Simons s’est éclipsé de chez Dior en octobre 2015, son siège est resté vacant près d’un an. Cependant, impossible pour la griffe de ne présenter aucune collection pendant ce laps de temps. Heureusement pour elle, elle a pu compter sur les deux étoiles de son studio de création, Serge Ruffieux et Lucie Meier. Le temps de quelques collections, le duo a démontré qu’il était apte à remplir les chaussures du créateur belge. Et après un passage par Carven, Serge Ruffieux a récemment annoncé le lancement de sa propre griffe, 13 09 SR, spécialisée dans la création d’accessoires.
Phoebe Philo, la régénératrice de Celine
© Stephane Cardinale/Corbis via Getty ImagesDiplômée de la Central Saint Martins School de Londres, Phoebe Philo fait ses premiers pas de designer en 1997, au sein de la maison Chloé, où elle officie aux côtés de Stella McCartney, rencontrée durant ses études. Lorsque cette dernière quitte la griffe parisienne en 2001, elle cède la place à Phoebe Philo, qui revisitera l’esthétique de la marque jusqu’à son départ en 2004. Trois ans plus tard, elle fait son retour, nommée chez Celine, autre maison parisienne pour laquelle elle œuvrera pendant près de dix ans. Sous sa houlette, la griffe gagne en chic et en sobriété et propose un prêt-à-porter minimaliste et fonctionnel qui n’oublie pas pour autant d’être hautement élégant. Son départ en décembre 2017 a des allures de séisme dans l’univers feutré de la mode et de nombreuses fans réclament son retour à grand renforts de comptes Instagram dédiés. En juillet 2021, la créatrice annonce le lancement de sa marque éponyme, soutenue par le groupe LVMH, pour janvier 2022.